« Le roman, de toutes les formes de l’expression est ce qui me convient le mieux. Il englobe tous les genres et se prête aux caprices de l’imagination la plus fantaisiste. Une seule loi : tenir le lecteur en haleine … » Journal, 20 juillet 1967
Dans l’œuvre de Maurice Zermatten les romans occupent une place de choix. Il en a écrit dix-huit qui sont tous ancrés dans le réel des villages valaisans tout en ayant pour thème des valeurs universelles, tels que, l’amour, la jalousie, le sacrifice, la peur, la politique, la mort…..
Les résumés qui suivent n’en sont qu’une description sommaire et ne rendent pas compte de son style inimitable au vocabulaire choisi, à la fois poétique et réaliste, aux sonorités vibrantes et limpides comme les sources de son Valais. Mais ils donneront à coup sûr l’envie de se plonger dans la lecture….
Lorsque Madeleine Fontannes aperçoit Jean Desvernes, bel officier qui défile lors du cortège de la Fête-Dieu, elle comprend que c’est l’homme de sa vie. Ce coup de foudre se transforme en un grand amour auquel s’oppose le Président, père de Madeleine qui interdit à sa fille de fréquenter ce braconnier sans le sou, d’autant plus qu’il destine sa fille à Jules Prabé.
Jean s’enfuit dans la montagne où va le rejoindre Françoise qu’il avait écartée. Celle-ci utilise le mensonge pour le reconquérir. Désespéré, Jean cède et l’épouse. Apprenant cette trahison, Madeleine tombe gravement malade. Mais un jour, en regardant une image du Christ, elle comprend le sens de la souffrance et le prix de la vie rachetée par la croix. Elle épousera Jules Prabé, acceptera une vie de sacrifice, sans amour, d’où le titre du roman : le Cœur inutile….
Ce premier roman fut salué par une critique unanime. Ramuz félicite Maurice Zermatten d’avoir « osé être vrai » dans ce livre « tout gonflé de richesse verbale », Léon Savary y voit un chef d’œuvre, début d’ «une rénovation artistique» et le critique renommé de la Neue Zürcher Zeitung, Edouard Korrodi s’exclame « Habemus poetam » !
En 1938, Maurice Zermatten reçoit le Grand Prix Schiller pour son roman Le Coeur Inutile. Il le recevra une seconde fois en 1956.
En 1957, il fait partie du Conseil de Surveillance de la Fondation Schiller en qualité de délégué du Conseil fédéral.
Dans une première partie, Michel, un jeune musicien nous livre son Journal intime. Il est déprimé et cherche un sens à sa vie. Lorsqu’il croise une jeune femme peintre, il croit l’avoir trouvé (= un sens à sa vie). Mais elle a déjà connu l’amour et cette faute planera sur leur vie de couple. L’amour dont ils avaient rêvé ne peut se réaliser, elle vivant dans la honte et lui dans le regret.
Dans la seconde partie du roman, c’est l’écrivain qui décrit ce couple torturé. Mais le jour où Yvonne apprend qu’elle porte leur enfant, « une grande flamme monta sur le foyer », illuminant ce Chemin Difficile.
« Elle a fauté ! » Cette réflexion était encore courante au milieu du XXe siècle dans les villages valaisans très catholiques où une jeune fille devait arriver vierge au mariage. Maurice Zermatten étudie ce thème dans ce roman, où seule la promesse d’un enfant apportera la rédemption.
Dieu est en colère contre le village de Chelin, sur la rive droite de la Dranse. Plus d’eau dans les torrents ni dans les bisses depuis que le Mal règne dans le village en la personne d’Emile. Revenu de l’étranger, il prêche une vie facile, sans travail et sans religion et sème la débauche et le désordre. La fureur de Dieu est à son paroxysme lorsqu’on apprend qu’au-dessus du village, derrière le glacier, un lac immense menace d’inonder la vallée et de détruire Chelin; les habitants avertis par les ingénieurs auront-ils le temps de partir avant que se manifeste la colère de Dieu ?
Maurice Zermatten s’est inspiré dans ce roman de la tragédie du 16 juin 1816 : le glacier du Giétroz s'avance, crée un lac au fond de la vallée ; une langue du glacier s'effondre dans ce lac et une inondation terrible du Val de Bagnes et d'Entremont, puis de la ville de Martigny, provoque la mort de près de 40 personnes et détruit tout sur son passage. C'est ce que les hommes vont appeler la "Débâcle du Giétroz"... ; les 200 ans de cette catastrophe sont célébrés en 2018, par pluseurs manifestations culturelles, notamment un film.
Maurice Zermatten est l’auteur d’un album contenant de nombreuses photos intitulé Mauvoisin, paru en 1962, Zurich AG. Fachschriften-Verlag & Buchdruckerei.
Dans le village de Signèse, deux familles s’affrontent depuis des générations, celle du Président Bétryson et celle du Juge Gobelet. Ces haines atteignent leur paroxysme lorsque, le Président ne se représentant pas, les deux candidats à sa succession sont son fils Pierre et le fils du juge Daniel. Mais le drame au cœur du roman est cornélien : Pierre aime depuis toujours Maria, la sœur de Daniel. Peuvent-ils aller au-delà de ces rivalités sauvages et vivre leur amour ? Le suspens de cette fresque villageoise nous tient en haleine jusqu’au bout de ce roman, fait à la fois de tendresse et de violence.
Les haines familiales, souvent à base de clans politiques étaient fréquentes dans les villages valaisans. Maurice Zermatten les a connues : son père, instituteur, devait exercer son métier dans des villages éloignés du sien pour des raisons politiques. Et les bagarres à coup de pierres n’étaient pas rares les soirs d’élections; il arrivait aussi que l’on paie de son sang….
Christine a recueilli le bébé que Lucien, un marginal, a apporté à sa grand-mère après la mort de sa femme. Or Christine a aimé cet homme et par amour pour lui, elle décide, à la mort de la grand’mère, d’élever son fils, malgré la colère de ses parents. Elle consacre sa vie entière à cet enfant, renonçant à son métier d'enseignante, à sa famille et à ses origines, à l'amour et au plaisir. Elle incarne une image sublime de la maternité dont le but suprême est de donner son fils à l’église ; elle y parviendra, mourant peu de jours après l’ordination, transfigurée de bonheur et de reconnaissance envers Dieu.
En 1966, André Béart a réalisé un film pour la télévision suisse à partir de ce roman, tourné en partie à Saillon. Le rôle de Christine était interprété par Martine Sarcey, tandis qu’Isabelle Villars jouait la mère de Christine. Jean Claudia était Lucien et Jean Hort le père de Christine.
Le thème du sacrifice se retrouve dans plusieurs romans de Maurice Zermatten, notamment dans le Bouclier d’Or ou le Jardin des Oliviers
Avec ce roman dont Maurice Zermatten dit dans son Journal qu’il est « entre le réalisme noir et la légende insaisissable », on entre dans le règne du fantastique : Jean-Pierre Gaudin est non seulement guérisseur, mais il est aussi sorcier et il règne sur les villageois à qui il jette des sorts et dont il profite.
Eugénie et Antoine s’aiment mais Antoine s’en va étudier la médecine. Au cours de ses études il découvre sa vocation, il sera prêtre et abandonne ainsi Eugénie. Celle-ci, pour se venger, se rend chez Jean-Pierre qui l’ensorcelle et lui fait signer un pacte. Elle dépend désormais entièrement de lui, d’abord comme femme dont la tâche est d’ensorceler les hommes du village, puis comme esclave et finalement prisonnière. L’apprenant, Antoine revient au village et réussit à faire disparaître le démon dans les flammes de sa maison.
La présence du Malin était dans les esprits des villageois valaisans. On croyait aux sorts, et aux malédictions de toutes sortes et on disait même des messes noires. Les conteurs en faisaient le centre de leurs histoires. Maurice Zermatten s’en inspire dans ce roman porté par un souffle poétique puissant.
Avant de fréquenter l’Université de Fribourg , Maurice Zermatten a suvi ses études secondaires à l’École normale de l’Abbaye d’Hauterive. Il s’est inspiré de ce couvent cistercien pour décrire le lieu où Antoine découvre sa vocation.
Si Christine et Mène dans le Bouclier d’or incarnent l’amour maternel, c’est de l’amour paternel qu’il s’agit dans ce roman. Martin a renoncé à la soutane et a épousé Estelle qui lui donne une fille, Marguerite. À la mort d’Estelle, Marguerite ne tarde pas à s’émanciper et profite de l’amour inconditionnel de son père : il se ruine pour payer les folles dépenses et les dettes de sa fille et noie dans le vin le chagrin qu’elle lui cause. Lorsqu’il apprend que sa fille vit avec Alexandre, un riche parvenu qui la maltraite, il demande à Louis, l’amoureux transi de Marguerite de l’aider à délivrer sa fille. Louis va dynamiter la maison d’Alexandre dans laquelle se trouve Marguerite. Martin, voulant la sauver est écrasé par les éboulis ; mais il a fait son devoir, et a eu le courage de pardonner, ce qui lui a été dicté lors de son « Jardin des Oliviers »….
Dans son Journal du 20 mars 1949, Maurice Zermatten écrit à propos de ce roman : « Les déchirements d’un père. De quoi je me mêle ? Voici que je m’engage chaque jour un peu plus profond dans les orties et les ronces de la vie… »
Deux villages, Albinen et Sasseneyres se partagent la même église, située à mi-chemin de l’une et l’autre. Une avalanche menaçant de tomber sur l’église le curé s’en va et se réfugie à Albinen. Tridondane, le Président de Sasseneyre est furieux et décide qu’ils se passeront d’église et de curé. Lorsque l’église est en effet soufflée par l’avalanche, c’est Adèle, une bigote qui avoue être possédée par le Diable, qui dit la messe dans une salle d’école et donne les sacrements aux mourants. L’évêque se voit obligé de prononcer l’excommunication des villageois.
Mais le village sera sauvé par Cécile, la fille de Tridondane qui a résisté à la démence générale et est devenue la servante d’un jeune prêtre de la vallée. Ils reviennent tous les deux au village, l’église sera reconstruite et les étoiles scintilleront à nouveau sur la paroisse réconciliée.
Maurice Zermatten s’est inspiré d’un fait réel, une avalanche qui détruisit l’église d’Albinen. Mais la gestation de ce roman a été longue. Il en parle en 1947 déjà dans son Journal :
« :..j’entrevois aussi une église emportée par une avalanche, et qu’il faudra reconstruire. Là commence le drame. Le canevas est historique…à moi de le nourrir de mon sang et de ma chair… »
Puis, en juillet 51 en parlant du roman : «… lui enlever tout caractère anecdotique, historique, géographique qui le priverait de toute universalité… avoir l’air d’inventer une histoire et des acteurs alors qu’au départ tout m’est offert sur un plat d’argent…. »
N’était le cadre, un barrage en construction avec ses ingénieurs, ses ouvriers, ses machines décrits avec beaucoup de réalisme, ce roman pourrait se passer n’importe où, ses personnages n’ayant rien à voir avec les paysans valaisans chers à l’auteur.
Quatre personnages en sont le centre et nous voguons de l’un à l’autre à travers leurs sentiments profonds, leurs hésitations, leurs déceptions, leurs décisions, exprimés dans des monologues intérieurs dont Maurice Zermatten a le secret.
Annie, la femme de Jacques qui gère un grand domaine agricole est amoureuse de Michel le médecin du barrage. De son côté, Jacques a une liaison avec Odile, la secrétaire de l’ingénieur du barrage et l’amie d’enfance d’Annie. Quatre personnages dont les amours illicites, en ce pays religieux et à une époque où les divorces étaient impensables, conduisent à des impasses. De longues périodes d’interrogations et de réflexions étaient sur le point de les ramener dans le droit chemin lorsque surgit l’accident …
Le titre, énigmatique, mais très symbolique, fait référence à un lierre qui, tel le mal, étouffait un figuier dans le domaine de Jacques. En l’éliminant à la base, Jacques réussit à redonner vie à l’arbre…
L’abbé Clivaz, un jeune prêtre s’efforce depuis 10 ans de ramener la foi et les villageois dans son église déserte depuis que Lévy Tinembart, propriétaire du café et du magasin a décidé de chasser l’abbé pour corrompre les villageois et les amener à dépenser leur argent dans ses commerces. Lui-même mène une vie dissolue, vivant avec plusieurs femmes et de nombreux batards.
Le drame éclate la veille du 15 août où il a organisé un bal. L’abbé Clivaz, scandalisé le maudit. Pour se venger, Tinembart attire l’abbé dans un guet-apens. Il envoie Rosalie chez l’abbé pour lui demander de l’accompagner chez une vieille femme qui se meurt. Sur le chemin le prêtre et la jeune fille sont attaqués par un homme masqué. La jeune fille est assommée, et meurt dans les bras du curé qui lui donne l’absolution. L’homme masqué c’est Lévy qui visait le prêtre ; pour s’en tirer, il demande à l’abbé Clivaz de l’entendre en confession ; ainsi ce dernier est lié par le secret et Tinembard l’accuse du meurtre et du viol de la jeune fille. Le prêtre est arrêté et condamné à la prison. Ce n’est qu’après sa mort qu’on apprend la vérité. Lévy cachait sa vraie femme dans un grenier d’où elle a tout vu et témoigne contre son mari indigne.
D’après la légende, Aréthuse était une nymphe transformée en source dont l’eau d’une pureté sans égale se mêlait à la mer sombre sans rien perdre de sa blancheur.
Pour écrire son roman Maurice Zermatten s’est inspiré d’un fait divers, un curé accusé d’attouchements sur des jeunes filles, emprisonné puis blanchi.
Un téléfilm éponyme a été tiré de ce roman en 1960. Madame Andrée Béart Arosa en a fait l’adaptation et André Béart la réalisation. Il a été diffusé en 1960, 1961 et 1965. Tourné à Varone, les acteurs principaux étaient : Georges Dimeray, Jean Vigny, Walter Schöchli, André Ammon et Monique Magni.
En 1959, Maurice Zermatten a reçu le Grand Prix Catholique de Littérature pour ce roman et l’ensemble de son œuvre. Le Président du Jury était François Mauriac.
Les trois parties de ce roman correspondent aux trois jours durant lesquels Mène veille son fils qui vient de mourir. Pendant ces longues journées, elle revoit toute sa vie. La rencontre avec Simon qu’elle épouse malgré les conseils de sa mère et qui s’en va gagner sa vie à Paris la laissant seule, vivant de l’espoir de ses rares visites. Ils auront néanmoins quatre enfants qui tous lui seront enlevés : deux meurent en bas âge, sa fille cadette prend le voile et Jacques, le personnage du livre, s’en va d’abord au collège, puis au service militaire et sera finalement mobilisé lors de la guerre. Lorsque Simon qui a perdu son emploi revient enfin, c’est un alcoolique qui est une charge nouvelle pour Mène plutôt qu’une aide. Après le collège Jacques a passé un an en Allemagne où, séduit par Barbara, il découvre Hitler et le nazisme. Complètement exalté et sous l’emprise de Barbara, en réalité une espionne, il trahit son pays. Mène l’apprend par une indiscrétion et après de longues journées d’hésitation elle prend une décision irrévocable, dans le but de sauver son fils…. Ce qui compte pour Mène, ce n’est pas l’humaine expiation (la prison) mais le rachat d’une âme égarée, et la certitude du pardon divin.
Maurice Zermatten pense à sa mère en faisant le portrait de Mène. Comme elle, elle a eu un mari peu présent, deux enfants morts en bas âge, une fille religieuse et un fils parti faire des études (l’écrivain lui-même). Heureusement elle n’a pas vécu la tragédie de Mène.
L’émission Carrefour du 9/11/1961 est consacrée à ce roman.
Le journal de Martin Mayor forme les quatre parties de ce roman. Il a perdu une jambe lors d’un accident de voiture et, infirme, retourne à Pralovins son village isolé de la montagne valaisanne où il ouvre un petit magasin. Dans la première partie il parle de ses douleurs physiques et surtout morales lorsqu’il a appris que Maria, son grand amour, est morte. Elle avait épousé par dépit un vaurien, son père lui ayant caché les lettres où Martin lui avouait son amour. Sans réponse, il avait quitté le pays. Dans la seconde partie, il se rapproche de Louise, la fille de Maria qui lui parle de la mort de sa mère et de l’amour qu’elle a éprouvé pour lui. La jeune fille représente pour Martin la fille qu’il aurait aimé avoir de Maria et la lumière de ses vieux jours. En parallèle, une révolution se prépare dans le village : on va y construire une route et le transformer en une station moderne. Martin est catastrophé. Dans la troisième partie, Martin revient de l’hôpital où il est resté de longs mois suite à une attaque cérébrale. La route est construite, les tractations avancent pour que les villageois cèdent leurs propriétés aux promoteurs : ils vont devenir riches ! Martin et Lucie sont les seuls à résister, mais abandonneront le village comme nous l’apprend en guise de conclusion la quatrième partie.
Maurice Zermatten a vécu la transformation des villages valaisans qui sont passés en quelques années du Moyen Âge à la civilisation moderne : c’est le thème de ce roman et l’on peut dire que Martin écrivant son journal pour « se confesser, se délivrer et tenter de comprendre», se moquant des promoteurs immobiliers en imitant leur jargon, est l’écrivain lui-même.
Le 8 avril 1961 il écrit : « J’ai dû me rendre à Verbier où les constructions nouvelles prolifèrent. L’immense cancer qui s’est enraciné là-haut m’a stupéfié…. Le voici bien mon Cancer des Solitudes .
Dans l’émission À livre Ouvert du 19/11/1964, Maurice Huelin interroge Maurice Zermatten sur ce livre.
Il en est aussi question dans l’émission Tell Quel du 27/09/1977.
Si dans le Chemin Difficile, les personnages trouvent une issue à leur amour, il n’y en aura pas dans Pays sans chemin.
Esther, la femme de Jean, un architecte connu, n’est pas heureuse : son mari la délaisse au profit de son travail. Lorsqu’elle rencontre un ami de son mari, Marcel, un jeune médecin qui représente l’amour dont elle a toujours rêvé, elle se donne à lui, consciente de commettre une faute. Lorsqu’elle accouche de Pierre Jean croit en être le père et elle ne le détrompe pas. Elle refuse alors de revoir Marcel qui se marie et a une fille Claude. Plusieurs années se sont écoulées lorsque Pierre, étudiant en médecine, rencontre par hasard Claude : c’est le coup de foudre et on assiste à la naissance de leur amour. Lorsque Pierre parle de Claude à sa mère, Esther est bouleversée. Elle est la seule à connaître la vérité et revoit sa vie dans un long monologue intérieur destiné à Pierre. Mais c’est pour Claude qu’elle rédige une lettre et rencontre la jeune fille : elle la persuade qu’il n’y a pas de chemin pour les deux jeunes gens.
Ce livre est fondé sur un fait divers dont un abbé avait parlé à Maurice Zermatten , lui demandant ce qu’un romancier ferait à sa place. Deux jeunes gens étaient venus vers lui pour qu’il les marie. Ils étaient recommandés par la mère du garçon. Or l’abbé connaissait le secret de cette femme. Devait-il avertir les jeunes gens qu’ils allaient, s’ils se mariaient, commettre un inceste ? Maurice Zermatten demanda 3 jours de réflexion ….et en fit un roman…
« Je n’ai pas d’imagination », disait-il, « je raconte ce que j’ai vécu ou ce que j’ai lu ou entendu… »
« Le romancier observe, choisit, élague, épure, gomme, résume, souligne, ajoute, force le trait, accentue la couleur d’un vice ou d’une vertu, mélange, brasse…. »
En 1968, Maurice Zermatten obtient le Prix Monceau à Paris
Comme Martin du Jardin des Oliviers, Gérard se rend compte qu’il n’a plus la foi nécessaire pour accomplir son ministère. Le jour où il rencontre Nathalie qu’il a aimée adolescent, il prend la décision d’abandonner sa soutane. Il quitte le village dont il était le curé au grand scandale de ses ouailles. Commencent alors les questions, les interrogations, aussi bien de sa part, sur sa foi et le bien-fondé de sa décision que de la part de Nathalie qui a été mariée et divorcée, qui hésite à se remettre en ménage, surtout avec un prêtre défroqué. De longs monologues intérieurs, des lettres à Paul, l’ami prêtre de Gérard, finiront par les convaincre tous les deux qu’ils sont faits l’un pour l’autre.. Leur voyage de noces les mène à Venise où Gérard est fasciné par la fresque de Simone Martini, le Condottiere Guidoriccio da Fogliano jusqu’à s’identifier à ce personnage « qui s’en va seul vers le néant..».
Lorsque naît leur enfant Gérard qui n’a plus revu Paul depuis plusieurs années lui demande de baptiser leur petite fille. Paul dira : «Je voudrais que tu aies la force de porter ta faute sans remords. Ton devoir maintenant c’est de rendre heureuses ces deux vies qui dépendent de toi » et : « il n’y a pas d’enfer pour ceux qui témoignent humblement de l’existence de Dieu ».
Vatican II a poussé de nombreux prêtres à quitter l’église ont beaucoup intéressé Maurice Zermatten . C’est l’histoire de l’un de ces prêtres qu’il nous conte ici.
Le 2 mars 1970 il écrit dans son Journal : dans son journal : " Une réalité douloureuse depuis la fin du Concile Vatican II : innombrables sont les prêtres qui jettent leur soutane aux orties…. Le journal parisien Le Monde donnait l’autre jour un chiffre terrifiant : 29 000…. 29 000 déserteurs… En suivre un dans la foule…Le suivre pas à pas…"
François Pralong revient dans son village de Laudhères qu’il a quitté pour aller à l’école de recrue. Il revoit le film de sa vie au cours d’une montée dans le chalet de son enfance.
Orphelin de mère, son père l’a élevé à coups de trique. Une voisine, mère célibataire lui dispense un peu d’amour maternel. Il tombe amoureux, pour son plus grand malheur, de sa fille Félicie. Celle-ci lui promet qu’elle sera un jour sa femme mais le transforme en domestique et quand enfin elle lui demande de l’épouser, c’est parce qu’elle est enceinte d’un autre. À plusieurs reprises François essaie de quitter Félicie, ne voulant pas croire tout ce que l’on raconte sur elle, mais l’amour paternel qu’il porte à la petite Hortense l’empêche de le faire. À la mort accidentelle de cette dernière il s’en va et croit être définitivement débarrassé de Félicie ; mais elle le poursuit et ivre, vient l’insulter ; il ne peut le supporter …. Ce lourd secret que l’on n’apprend qu’à la fin du livre est la raison de sa fuite et sa décision d’en finir, en montant toujours plus haut dans les neiges vers cette Porte blanche qui le délivrera.
Maurice Zermatten avait lu dans les journaux de 1966 qu’un homme avait été retrouvé mort dans les glaces. C’était un guide de montagne, il s’appelait Jean Pralong et marchait dans la neige en chaussures de ville …Pendant de longues années, cet homme a hanté MZ. Qu’allait-il faire seul dans la neige, revoir ses montagnes avant de mourir ? Pourquoi ? Et soudain : « ce doit être un assassin ! »
Repris une première fois en 1970, ce n’est qu’en 73 que paraîtra le roman.
En 1974, Maurice Zermatten obtient trois prix :
Le prix de la Ville de Sion, pour l’ensemble de son œuvre
Le Prix du Rayonnement de la Langue française
Le prix Alpe Jura.
Après avoir bourlingué dans le monde, Laurent revient à Erbignon, son village natal. Malade, il occupe son temps à la lecture d’un carnet noir, le journal qu’il écrivit, adolescent, lors d’une année d’apprentissage à Grenchen. Le roman est construit selon une alternance de pages du journal du jeune homme de 16 ans, amoureux de la ravissante fille de la maison, Sonia, une pianiste virtuose, et de celles du roman qu’écrit Laurent avec le recul de l’homme mûr à partir du souvenir de ce premier amour qu’il n’a jamais oublié. Sonia doit épouser un riche marchand qui lui offrira le piano à queue dont elle rêve. Mais elle ne peut s’y résoudre et se confie à Laurent : il sera le témoin de la tragédie finale.
Maurice Zermatten se souvient dans ce livre d’un séjour qu’il fit à Grenchen pour apprendre l’allemand.
Il y décrit les troubles de l’adolescence et la découverte de l’amour entre rêve et réalité. C’est le seul de ses romans dont l’action ne se situe pas en Valais.
Colas est le guérisseur du village. Il a hérité ce don de son père et à appris auprès de lui les vertus thérapeutiques des plantes. Pendant des années, il a soulagé les villageois accourant à leur chevet distribuant des potions, posant des cataplasmes de sa confection, apaisant leurs souffrances et faisant reculer l’heure de leur mort. Mais avec la nouvelle route et la Caisse maladie, les villageois vont consulter le médecin de la ville et boudent ses services. Devenu inutile et traité de charlatan, il se retire dans sa cabane de l’Alpage avec son chien et sa chèvre. Il y revoit toute sa vie qui ne pourra finir que dans la tragédie…
C’est grâce à sa grande connaissance des plantes des Alpes valaisannes qu’il tenait de sa mère que Maurice Zermatten a pu écrire ce livre qui est aussi un magnifique portrait, poétique et réaliste à la fois, de l’homme qui «appartient à l’univers et à qui Dieu a donné sa place » comme à chaque fleur, à chaque étoile….
Ce roman, comme tant d’autres, évoque un fait réel : la disparition du village de Randonnaz au-dessus de Fully, en Valais (devenu Zampé dans le roman). Inaccessible pendant les mois d’hiver à cause des avalanches qui bloquent le Grand Couloir, privant le village d’eau, d’électricité, de prêtre et de facteur. Les autorités cantonales et religieuses convainquent par la menace et la force les habitants de quitter le village, mettant à leur disposition des terres prises sur des marécages de la plaine.
Le peintre Philippe Tavernier revient sur les lieux où il a passé un hiver avec son père, guidé par une de ses amies d’alors Marthe. Il ne reconnaît rien car tout a été rasé, mais à eux deux, les souvenirs prennent vie et ils reconstruisent dans leur mémoire, le hameau, ses habitants, ses coutumes, les soirées passées à écouter des légendes et la résistance des villageois face au déracinement qu’on leur impose. Il apprend aussi le parcours d’Arthur qui n’a jamais supporté d’être déraciné.et a noyé son chagrin dans l’alcool. Histoire d’un Paradis perdu contée avec un grand lyrisme.
Petit hameau situé au-dessus de Fully en Valais, Randonnaz a été supprimé de la carte en 1930. Il n’en subsiste qu'un moulin et un oratoire qui énumère les noms des derniers habitants.
Maurice Zermatten avait passé l’hiver de 1920 dans ce village, suivant son père qui y enseignait. Il avait été particulièrement concerné par la disparition de ce village.
C’est son dernier roman. Après celui-ci, il s’est tourné vers les contes et légendes ; il écrira plusieurs livres inspirés par les veillées, où les contes des vallées étaient le centre d'intérêt. Sa mère était une conteuses appréciée (voir le Livre de contes "Racontez Maman").
Dans l’émission Miroirs du 17/04/1983 Maurice Zermatten parle de ce roman et répond aux questions : est-il un écrivain régionaliste, valaisan, traditionnaliste ?